Filippo Contarini a inventé le concept de Radical Legal History qui inscrit le droit dans son histoire, démontrant que cette discipline n’est pas un objet hors du temps. Professeur d’histoire du droit à l’université de Lausanne, il a fait ses études à Lucerne et à Zurich. Après un postdoc à l’institut Max Planck d’histoire du droit et de théorie du droit de Francfort-sur-le-Main, sur le thème Postcolonial legal theory through Swiss triangular commercial legal history. An interdisciplinary approach, il obtient une nouvelle bourse post-doctorale, au sein de l’Institut d’histoire du droit Jean Gaudemet, sur le thème The Swiss Commercial Law in France in the Context of Atlantic Triangular Trade (1648-1794). C’est le travail sur les archives de l’histoire de l’esclavage et de la participation des Suisses à l’expansion coloniale française, qui l’amène à réfléchir sur ce concept de Radical Legal History, résolument pluridisciplinaire et qui prend en compte une histoire globale.
J’ai rencontré Filippo Contarini, lors de la douzième édition du Congrès ibérique d’études africaines (CIEA) qui s’est tenu en janvier 2025 à l’Université de Barcelone sous le thème Réponses africaines au dilemme colonial. Ses interventions lors du colloque et la découverte de la Radical legal history, m’ont paru l’occasion d’un podcast réflexif pour notre Playlist “Questions éthiques et juridiques”, voilà ainsi notre n°4. Dans cet entretien, il définit ce concept à travers son objet de recherche et illustre ce que peut être le silence dans les archives. Il prend en exemple son travail sur la participation des marchands suisses à l’expansion coloniale et esclavagiste dans l’ancien régime, au 16° et 17° siècles, et comment ceux-ci ont utilisé le droit. Pour lui, c’est dans les archives que surgit l’ombre des esclaves, notamment dans les archives publiques dont l’accès est ouvert. Après avoir exposé, en contrepoint, l’accès empêché aux archives familiales privées, Filippo Contarini introduit la question du courant wokiste en France, qui, en définitive est un frein bien présent pour l’accès aux archives publiques, en ce qui concerne la question coloniale.
Publications et sites en lien avec le podcast :
Thomas David/ Bouda Etemad/Janick Marina Schaufelbuehl, La Suisse et l’esclavage des Noirs, Antipodes & SHSR, Lausanne 2020.
Georg Kreis, Blicke auf die koloniale Schweiz : ein Forschungsbericht, Chronos, Zürich 2023
“Comment la Suisse a participé et profité de l’esclavage”, Podcast de la Radio nationale suisse, https://www.rts.ch/info/suisse/2024/article/comment-la-suisse-a-participe-et-profite-de-l-esclavage-28527727.html
En préparation : Filippo Contarini , “La langue cachée ? L’absence des esclaves de la théorie des choses en droit français (XVIIIe siècle)” dans Tappy Denis, Peroz Anne (eds.) Actes des Journées de Lausanne SHD 2023, Stämpfli. [serval:BIB_062B1FBF7DB3]
La fiche biographique de Filippo Contarini à l’Université de Lausanne.
Crédits photographique de l’image “à la une” : Esclaves africains tout juste libérés de leurs chaînes mais encore entassés dans les cales de l’Albanoz, un navire négrier espagnol capturé en 1846 lors d’une patrouille antiesclavagiste de la Royal Navy, au large de la côte ouest-africaine. Date 1846 Source National Maritime Museum, Greenwich, Londres, Peint par le Lieutenant Francis Maynell (1821-1870), licence domaine public, accessessible sur wikimedia.